A Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis, des fermes urbaines favorisent l'accès à une alimentation saine et durable.
Connaissez-vous le chou gros, la betterave rouge noire ou encore l’oignon paille des Vertus? Des variétés potagères nées sur la plaine des Vertus, terre particulièrement fertile qui, de Saint-Denis à Bobigny, a alimenté les Parisiens en produits frais jusque dans les années 1950. Aujourd’hui, la Seine-Saint-Denis est l’un des départements les plus urbanisés (90% de terres artificialisées) et les plus pauvres de France (27% de taux de pauvreté, 2 fois plus que la moyenne nationale). La crise du Covid et l’inflation ont renforcé les inégalités sociales et environnementales. Depuis quelques années, des fermes urbaines renouent avec le passé maraîcher du département et se mobilisent pour lutter contre la précarité alimentaire.
C’est le cas de 2 jeunes fermes d’Aubervilliers, séparées par le canal Saint Denis : Culticime, qui partage ses récoltes avec des habitants en difficulté, et Terre Terre, une ferme par et pour les habitants.
Après avoir pris un ascenseur, grimpé une échelle et franchi une passerelle, on arrive sur les terres de Culticime. Cette ferme, portée par l’association Espaces, se situe sur le toit du Fashion Center, un centre commercial regroupant de nombreux grossistes de la fast fashion. Au loin se dessinent le Sacré-Coeur et la Cité de la musique. Sous la chaleur de la serre, Alexandre, le responsable de la ferme, parle des valeurs de Culticime. En partenariat avec l’épicerie solidaire Epicéa, elle partage ses récoltes avec les plus démunis : “Une partie de nos fruits et légumes est distribuée dans des paniers solidaires à 1€ aux personnes qui ne pourraient pas acheter des légumes frais de qualité toute l’année. ”
De l’autre côté du canal, Terre Terre est au contraire au ras du sol. Entourée d’entreprises de récupération de métaux et de palettes de manutention, cette ferme urbaine a des airs de terrain vague. Ici, des membres de l’association LA SAUGE et des habitants du quartier s’activent pour rendre le jardinage et l’alimentation durable accessibles à tout le monde : “On voulait que Terre Terre soit un lieu de quartier (…) Tout le monde peut louer une parcelle. Le tarif est solidaire, c’est en fonction de ce que la personne peut payer”, explique Eva, volontaire en service civique.
Des initiatives bien accueillies par les habitants, comme Anne, retraitée et bénévole à Terre Terre : “Le jardin, c’est vraiment un lieu convivial et de partage. Comme on fait des choses ensemble, on crée du lien : on s’est déjà retrouvés pour partager des repas !”, explique-t-elle, enthousiaste. A Culticime, Melissa, mère de famille, se dit ravie des paniers solidaires : “Au début, je me disais que c’était humiliant de demander de l’aide. Mais j’ai été très bien accueillie. J’ai bénéficié des paniers solidaires et mes enfants étaient contents de goûter autre chose que des conserves. Le goût n’a rien à voir.”