Avec ses vidéos engagées et pédagogiques, Charles Merlin, alias “Vivre Moins Con”, vulgarise, depuis deux ans, l’actualité sur les réseaux. A mi-chemin entre engagement écologique et critique sociale, le créateur de contenu porte un regard lucide sur les défis de notre époque et nous invite à passer à l’action.
“Les réseaux sociaux, c’est une porte d’entrée, mais l’essentiel, c’est de pousser les gens à agir.” Derrière les larges lunettes en métal qui encadrent son visage, M. Merlin n’a pas de baguette magique. S’il en avait une, il ferait “évoluer l’espèce humaine de sorte qu’il n’y ait plus de comportements prédateurs, que ce soit vis-à-vis d’autres humains ou de la nature.” Malheureusement, il n’est pas enchanteur. Mais il essaie quand même, à sa façon, d’avoir un impact sur le monde, en nous aidant à réfléchir.
Il y a deux ans, Charles, de son prénom, a créé la chaîne “Vivre moins Con”. Créateur de contenu sur Tiktok, Instagram et youtube, il fait de la vulgarisation engagée de l’actualité. “ Sur TikTok, je me suis rendu compte qu’il y avait de la place pour du contenu éducatif et intelligent, pas que pour la culture du vide”, explique t-il. Fan de documentaires comme Le sel de la terre de Wim Wenders, il commence à partager des extraits bruts: “ Il fallait que tout le monde voit ça”. Petit à petit, il commence à montrer sa tête, toujours sans commenter. Et la mayonnaise digitale prend.
L’engagement de Charles Merlin remonte à 2018. D’abord l’électrochoc provoqué par la lecture de Comment tout peut s’effondrer, de Pablo Servigne et Raphaël Stevens. Ajoutez à cela la démission de Nicolas Hulot, la même année, de son poste de ministre de la Transition écologique et solidaire, les discours de la jeune activiste Greta Thunberg, les marches pour le climat, et vous obtenez un homme qui ne peut plus détourner les yeux. Pour Charles Merlin, l’engagement passe aussi par la représentation.“ Il faut des figures comme Feris Barkat, des personnes issues de milieux populaires, de minorités visibles, qui incarnent ce qu’elles défendent”, insiste-t-il.
Sa prise de conscience s’est nourrie de ses différentes expériences personnelles et professionnelles. “À quoi je servais, finalement ? À enrichir deux co-fondateurs et à vendre plus de produits”, résume-t-il avec une pointe d’amertume son passage dans une entreprise spécialisée dans le social media monitoring, un outil d’analyse des données en ligne destiné à optimiser les stratégies de clients comme Disneyland, Deezer ou encore Airbus. Certes, ses études en langues étrangères appliquées et ses voyages – Barcelone, Lisbonne ou encore Rio de Janeiro – lui ont permis d’élargir son regard sur le monde. Mais c’est au cœur de la startup nation qu’il prend en pleine face une réalité qu’il qualifie aujourd’hui de « vide de sens ». Un passage qui lui aura toutefois permis de maîtriser les rouages des réseaux sociaux (et de s’améliorer au babyfoot !). “ Malgré la bonne ambiance, j’étais malheureux”, souffle-t-il.
Il décide alors de se former à la mécanique vélo et commence à travailler à Décathlon dans le 19e arrondissement de Paris. “ Pour la première fois, j’ai ressenti l’exploitation”, se souvient-il. En parallèle, il milite chez Europe Ecologie les Verts, dont il se fait suspendre après avoir appelé à voter Mélenchon au second tour. C’est peu de temps après qu’il se lance pleinement dans la création de contenus. “ Je ne roule pas sur l’or mais j’arrive à en vivre”, affirme t-il.
Charles Merlin est né loin des réseaux sociaux, dans un hameau d’une cinquantaine d’habitant.es près de Beauvais, où sa mère était employée de banque et son père contrôleur de travaux publics. “ J’ai grandi avec un autre rapport à la nature, loin du béton et de l’acier”, sourit-il. Une enfance bucolique qui s’inscrit en filigrane de son engagement écologique même si, à l’époque, ses préoccupations tournent davantage autour des cabanes dans les arbres que des politiques climatiques. Mais l’enfant des bois a grandi. Il compte aujourd’hui 229 000 sur tiktok et 188 000 abonné.es sur Instagram. À force d’expérimenter, le format évolue. Aujourd’hui, ses vidéos mêlent des analyses face caméra et des images d’illustrations sur fond sobre, si l’on fait exception du néon flamant rose dans sa bibliothèque.
Un flamant rose vu par 9 millions de personnes. Pas tous.tes bienveillant.es. Après avoir publié une vidéo où il expliquait comment signaler la cagnotte du policier qui avait tué Nahel, il est devenu la cible d’internautes et a reçu des menaces de mort. “Malgré ça, ma communauté reste très positive et les commentaires malveillants sont minoritaires”, insiste-t-il. Celui qui a aussi été un temps consultant en bonheur au travail a trouvé un nouveau sens à son parcours. S’il ne se voit pas créer un gros média, “comme Hugo Décrypte”, le flexitarien – qui avoue craquer pour les poulets fermiers de sa mère – aimerait élargir son contenu et son audience, se tourner vers du contenu plus humoristique et faire plus de partenariats. Il a d’ailleurs prévu des vidéos avec Reporterre et Arte au début de l’année 2025. Un enchanteur des temps modernes, armé de sa voix, calme et persuasive, de ses convictions et d’un compte TikTok, bien décidé à prouver qu’on peut vivre moins con et donc mieux en s’informant.
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