Le saviez-vous ? Les fleurs qui ornent les salons du Ritz poussent en Seine-Saint-Denis. Des fleurs cultivées de manière biologique par des employés en insertion. Un projet signé Halage.
On n’en a pas forcément conscience mais quand on offre un bouquet, nos roses, tulipes et hortensias font le tour du monde avant d’arriver chez notre fleuriste de quartier. Et ça n’a rien d’une hyperbole: 80% des fleurs coupées achetées en France viennent de la corne de l’Afrique, d’Amérique du sud, du Moyen-Orient et d’immenses serres chauffées aux Pays-Bas. Offrir une rose en février pour la Saint-Valentin et avoir accès à énormément de variétés toute l’année a un prix. Social et écologique: des conditions de travail déplorables pour les cultivateurs et cultivatrices, des sols très pollués par les pesticides, d’innombrables trajets en avion. Bref, un bilan carbone qu’on ne peut plus se permettre.
Sur l’Île-Saint-Denis, les employés de Fleurs d’Halage travaillent dur pour changer la donne. Le projet fait partie de Lil’ô, un pôle qui regroupe, à l’initiative de l’association Halage, plusieurs activités sociales et écologiques. La terre du site est par exemple amendée par le compost des Alchimistes, une entreprise qui collecte des déchets organiques en circuit court pour les composter.
Pourtant, ce site n’a pas toujours été un modèle en matière d’écologie. Le sol de cette ancienne friche industrielle est encore pollué par les métaux lourds et les hydrocarbures. “On voulait faire pousser des tomates et des concombres sauf qu’on était sur un sol pollué”, raconte Stéphane Berdoulet, co-directeur d’Halage. D’où les fleurs.
Depuis le belvédère qui surplombe le milieu du terrain, fait de terres excavées de la friche, on aperçoit la serre. 1800 m2, non chauffés, pour couver des fleurs de saison, produites localement et sans produits phytosanitaires chimiques : “On veut raconter une autre histoire en cultivant des fleurs en pleine terre, manipulées le moins possible, et coupées à maturité pour aller directement chez le fleuriste.” Un engagement qui a permis à Fleurs d’Halage de se faire un nom là où on ne l’attendait pas forcément : “Aujourd’hui, on produit des fleurs pour des grands hôtels comme le Ritz ou pour des fleuristes qui veulent des fleurs locales”, conclut Stéphane Berdoulet, fier du chemin parcouru.
Il faut dire que les employés sont aux petits soins. Tous et toutes sont en insertion et se forment à l’horticulture durable. La plupart sont des personnes en difficulté socioprofessionnelle qui souhaitent prendre un nouveau départ. C’est le cas d’Alexandre, encadrant à l’association, qui témoigne : “J’ai arrêté l’école après la 3ème, ensuite j’étais en CFA en tant que boulanger. Maintenant, je suis à Halage, je me sens très bien dans ma vie. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas le bac qu’on ne peut pas être quelqu’un.”