À l’occasion du cyclotour des tiers-lieux d’Ile-de-France, transonore a visité la Cité Maraîchère de Romainville, un des lieux pionniers en matière d’agriculture urbaine, où la priorité n’est pas de nourrir mais plutôt de transmettre.

Deux tours de 3 et 6 étages remplies de cultures de tomates, de poivrons ou champignons pour seulement nourrir une quarantaine de familles ? « Oui, l’agriculture urbaine ne permettra pas de nourrir tout le monde », admet d’emblée Yuna Conan, directrice de la Cité Maraîchère de Romainville. « Mais on propose des tomates augmentées : de sensibilisation, d’insertion et d’équité sociale », nuance-t-elle tout de suite. Imaginé dans les années 2010, le bâtiment a pris du temps pour sortir de terre. S’il ne convient plus totalement aux enjeux actuels, il reste néanmoins un phare dans la ville pour sensibiliser les habitants.« Beaucoup sont d’abord attirés par les grandes tours, et découvrent ensuite ce qu’il y a à l’intérieur », précise Yuna Conan. 

Et l’intérieur a de quoi fasciner. Tout en hauteur et sur près de 1000 m2, des fruits et légumes, champignons et herbes aromatiques sont cultivés dans des bacs en inox éclairés aux leds. Une vision futuriste de l’agriculture urbaine où les exploitants prennent l’ascenseur pour arroser les plantations et où l’on a introduit des guêpes dans des petites boîtes en carton pour réaliser la pollinisation. « Ça serait effectivement plus facile sans tout ce bordel-là au-dessus », sourit Yuna, en levant les yeux au ciel. Elle évoque alors l’ascenseur en panne, les réservoirs d’eau de pluie indisponibles ou les ouvertures lumineuses insuffisantes. « Vous connaissez bien, j’imagine les problèmes financiers ou de structures des tels lieux ? », lance-t-elle aux participants du cyclotour des tiers-lieux, dont beaucoup gèrent ou tendent à s’occuper d’espaces similaires.

Des produits vendus en fonction du quotient familial

Alors oui, une fois passée la porte automatique et la phase d’étonnement, on se rend compte que la ferme maraîchère de Romainville grouille d’activités. Il y a les ateliers cuisine, presque tous les samedis, les grands évènements, comme le festival des transitions gourmandes fin septembre, et surtout les marchés organisés chaque semaine. Ici, pas besoin d’indiquer l’origine des produits, ils proviennent tous des étages d’au-dessus ou de la cave où l’on cultive en masse champignons et endives. Pas besoin non plus de faire chauffer le porte-monnaie pour obtenir des produits de qualité : l’ensemble des prix s’adaptent à la situation financière des clients. « On se base sur le quotient familial de la ville pour les cantines scolaires, donc on ne demande pas aux gens de montrer leur situation en public », précise Yuna Conan. En fonction de chaque situation, les prix baissent de 25, 50 ou même 75%. 

Le milieu urbain est peu adapté à l’agriculture

Un service social soutenu par la municipalité, qui attire de nombreux habitants. « Une heure avant le début du marché, il y a déjà une longue file d’attente pour avoir accès aux meilleurs produits », racontent les employés en insertion. Fort de ce succès, le tiers-lieux accompagne l’installation de potagers dans le quartier pour permettre à d’autres de se nourrir sainement. Mais, là encore, le milieu urbain présente son lot d’inconvénients : pour éviter la pollution des sols d’un ancien site en friche, il a par exemple fallu mettre de la bonne terre ou planter hors sol. Si bien que pour Yuna Conan, le problème principal reste « qu’on ne produit pas encore assez ».

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